Dans notre métier le premier entretien entre le coach et le coaché est parfois appelé « un shopping » signifiant la première rencontre de nature commerciale en vue de  l’acquisition d’un nouveau contrat quand il y a plusieurs coachs mis en concurrence.  Au de delà du terme pas très élégant vis-à-vis du client et auquel je préfère celui  « d’entretien de choix réciproque », il pose la question de sa posture dans un acte commercial; donc dans une certaine mesure de la notion de  « séduction », de plaire  afin d’emporter le contrat mais pas à tout prix, en prenant les précautions nécessaires à une réussite de l’accompagnement.

Dès le premier contact (voire même avant par le oui-dire) s’échangent des éléments, des informations, des impressions qui feront que la relation entre le coach et son potentiel futur coaché s’installera plus ou moins bien ou pas du tout. Je crois qu’au travers la qualité de la relation créée entre le coach et son client réside une partie de la puissance de l’accompagnement. Certains considèrent  que c’est inutile, que seule l’analyse des éléments du système et leur interaction sont de nature à influencer positivement  l’accompagnement et que la relation coach – coaché n’est pas importante.

Alors ce premier entretien de choix réciproque nécessite quelques précautions en terme de respect du processus. Une recommandation bien connue et pourtant pas toujours respectée c’est le fait que c’est au futur coaché de vous contacter et non l’inverse. Vous aurez communiqué vos coordonnées au prescripteur en l’autorisant à les transmettre à « l’intéressé » ( c’est ce qu’il faut valider justement).

En terme de processus, il me parait très important de poser le cadre de l’entretien dont la durée ( souvent plus court qu’une séance) 1H00/1H15 doivent suffire pour se positionner. Puis préciser l’objectif de cet entretien de choix réciproque afin que chacun ait bien à l’esprit que pour chacune des deux personnes il y a liberté d’y aller ensemble ou pas. Ce n’est pas,  ou ça ne devrait pas être  un simple acte de vente avec les risques de séduction et de compétition (notamment quand le coaché rencontre d’autres coachs pour réaliser son choix) pour les deux protagonistes. Chacun devrait se sentir le plus libre possible de poursuivre ou pas le chemin avec la personne qui est en face de lui. Pour ma part je formule ce cadre en rappelant en début de séance l’objet de cet entretien  qui est de savoir si je peux et si nous voulons travailler ensemble dans une démarche de coaching. Au delà de la capacité  à faire travailler le client dans son environnement, sur ses problématiques,  il me semble   important qu’un minimum de feeling passe pour les deux avant le démarrage. La relation va se construire, évoluer tout au long de l’accompagnement. Une relation  « trop ouverte », « trop rapidement »  devrait susciter un peu de prudence de la part du coach. Que se passe – t – il pour lui ?  Quelle est sa part de responsabilité dans le fait que la personne qu’il reçoit soit  si rapidement « conquise ».

A la fin de l’entretien lors de la conclusion,  je demande où en est le coaché, comment il s’est senti dans la relation ? Plus que le contenu de la réponse, ce sont les signes, le processus,  la congruence de sa réponse qui m’intéressent. Je me prononce sur ma capacité à l’accompagner (liée à la problématique) et à  ce que j’ai pu ressentir dans la relation que je ne partage pas la plupart du temps à ce stade. Ma décision s’appuie sur  le minimum de  marge de manœuvre au dessous duquel  je ne me sens pas libre de travailler correctement, sur  la volonté du coaché de poursuivre, sur les premiers éléments de la demande qu’il a pu exprimer et  qu’il s’agira de creuser encore et encore durant plusieurs séances. J’invite le plus souvent le coaché à prendre un peu de recul et à me communiquer un délai dans lequel il me donnera sa réponse.

Pour examiner notre degré de liberté lors d’un entretien de choix réciproque il me parait utile de distinguer plusieurs cas pour le coach et le coaché  :

Le coach salarié au sein d’un cabinet, le coach indépendant, l’enjeu que représente le coaching pour chacune des parties, le degré de liberté qu’a le coach de ne pas prendre cet accompagnement, le degré de liberté du client de prendre ou de ne pas prendre ce coach voire de ne pas prendre le coaching du tout. Notamment lorsque le coaching est prescrit.

Cette liberté réciproque est essentielle  pour la suite. Alors examinons ce qui pourrait limiter notre capacité à refuser cet accompagnement.

  • Si je suis un coach salarié,  mon cabinet me permet – il de refuser un coaching ? Qu’est ce qui est prévu dans ce cas ? Je recommande quelqu’un d’autre du cabinet ?  Ai-je une obligation de développement commercial ? Ou en suis-je de mes objectifs ? Cela fait il plusieurs fois que je refuse ? Suis-je capable d’expliciter pourquoi je ne prends pas ? Suis-je écouté ? Ai-je travaillé en supervision voire en thérapie les rasions de mes refus ? Est ok de dire non pour moi ?
  • Si je suis coach indépendant, suis-je en sous – activité, ai-je besoin de chiffre d’affaire pour boucler mes fins de mois ? Ai-je assez de coachings en-cours pour avoir le sentiment de faire mon métier de coach ? Ai- je peur de perdre le client (prescripteur), ou de ne pas entrer chez ce nouveau client si je refuse ce coaching  ?

Qu’est ce que je ressens (ou pas) dans la relation qui m’incite à refuser cet accompagnement ?  Est ce que je souhaite refuser ce coaching ? Ce refus est il lié aux compétences que je pense ne pas avoir ? A la « qualité »  de la relation ? A la personne qui est en face de moi ? A mes propres peurs ?

Comment communiquer ma réponse en cas de refus, en cas d’acceptation de ma part ?

Si le refus émane de nous, coach, il peut reposer sur notre incapacité à répondre à  la demande du client que nous ne savons pas traiter et nous le lui disons. C’est une preuve de professionnalisme et du respect de notre déontologie. De même si la  demande qui nous est formulée est en contradiction avec notre déontologie ou des aspects éthiques… nous expliquons.

Si l’origine du refus est davantage liée à la personne qui vient vous voir ou ce que nous avons ressenti  dans la relation, ça peut être plus délicat à exprimer mais je crois qu’une métacommunication en parlant de soi et pas de l’autre peut être réalisée.

Dans les cas de refus,  notamment en lien à notre incapacité à traiter la problématique  du client vous pouvez, sans que ce soit obligé, recommander un autre confrère si le client le souhaite.

Comment écouter un refus du coaché ?

Accueillir sa réponse en le remerciant de l’avoir formulée, éventuellement si vous êtes en situation de le faire et avec beaucoup de douceur dans la forme, lui demander les raisons de son choix ? Attention dans le processus à ce que le client ne se sente pas dans l’obligation de se justifier sinon mieux vaut s’abstenir.